C'est donc hier que TF1
diffusait le premier des trois débats de la primaire de la droite et du centre.
Face à trois journalistes, les sept candidats (Jean-François Copé, François
Fillon, Alain Juppé, Nathalie Kosciusko-Morizet, Bruno Le Maire, Jean-Frédéric Poisson
et Nicolas Sarkozy) ont échangé et débattu pendant plus de deux heures.
Avant de se pencher sur les éléments de fond, quelques
remarques sur la forme en préambule.
Le format choisi pour
ce débat a, je crois, été paradoxalement la force et la faiblesse de l'émission.
En effet, les temps de réponse courts impartis ont permis une circulation dynamique
de la parole évitant ainsi des monologues interminables. A l'inverse la minute accordée
était parfois (souvent) trop courte pour apporter une réponse construite et
argumentée.
Évidemment ces
contraintes de temps étaient directement liées au nombre de participants mais
cela était également conditionnée par la volonté des organisateurs d'aborder un
nombre important de sujets différents. Dans la mesure où trois débats seront
organisés, je pense qu'il aurait été préférable d'associer une ou deux grandes
thématiques à chaque confrontation afin d'aller davantage au fond des choses.
En l'occurrence, consacrer ce premier temps d'échange exclusivement aux questions d'économie
m'aurait semblé préférable.
Si l'économie n'a pas
été l'unique thème du débat, il n'en reste pas moins que cette thématique a
évidemment été abordée. Chaque candidat
a ainsi pu mettre (brièvement) en avant ses propositions qui sont
finalement sensiblement les mêmes. Plus que des différences réelles de solutions, il
s'agit davantage de nuances ou de degré d'appréciation. Sortie des 35h, réduction
drastique de la dépense publique (entre 50 et 100 milliards d'euros par an) et
du nombre de fonctionnaires (de 300 000 pour Sarkozy et Juppé à 600 000 pour Fillon),
recul de l'âge légal de départ à la retraite ou encore baisse des charges pour
les entreprises.
Vieilles recettes pour
les uns, véritable surenchère pour les autres, il est clair que ces
propositions s'inscrivent dans la continuité des politiques menées ces
dernières décennies avec toutefois, reconnaissons-le, des niveaux jamais
atteints. Pour autant, comment croire que ces solutions seront efficaces cette
fois-ci alors qu'elles ont toujours échoué par le passé ? Pour la plupart, ces préceptes
ne sont que des marqueurs, des positions face à de prétendus totems. Les 35
heures en sont l'exemple parfait. De fait, dans le privé, le temps de travail
est déjà négocié au niveau des branches ou des entreprises. A l'inverse, dans
le public, ces mêmes 35h ne sont pas toujours respectées. N'oublions pas non plus que
ces 35h ne sont ni plus ni moins "que" la durée légale du travail
permettant de déclencher les heures supplémentaires et qu'il est donc possible d'y déroger. Les
raisons de la lutte contre les 35h ne sont alors pas forcément à chercher sur
le terrain de l'économie. Au contraire, cela constitue un marqueur identitaire
pour cette droite qui cherche à abattre ce "symbole de la gauche".
Pour en terminer sur le
chapitre économie, je souhaitais souligner deux propositions à mon sens trop
rapidement évacuées mais qui mériteraient un débat plus large. D'une part, la mise
en place d'une "vraie TVA sociale" évoquée par Jean-François Copé, c'est-à-dire
l'augmentation de trois points de la TVA en contrepartie d'une baisse des cotisations patronale et salariales. Objectif : gain de compétitivité pour les entreprises, hausse du
salaire net et élargissement du financement de notre protection sociale. Ayant déjà abordé le sujet par le passé, je ne m'y attarderai pas davantage.
D'autre part, la
question du statut des fonctionnaires a été posée notamment par Nathalie Kosciusko-Morizet. Je n'ai pas
d'avis tranché sur le sujet mais je pense que cette question ne doit pas être
condamnée par principe. Je crois au contraire qu'une réflexion doit être menée
sur deux aspects : l'emploi à vie dans la fonction publique et la pertinence du
statut de fonctionnaire dans les collectivités territoriales. Nous aurons
l'occasion d'y revenir dans le futur.
La deuxième partie du
débat était consacrée aux aspects régaliens (sécurité, immigration, laïcité …).
Là encore beaucoup de sujets balayés en peu de temps. Et là aussi rien de
nouveau sous le soleil tant les différentes propositions des candidats ont été
largement évoquées dans les médias ces dernières semaines. Aucun intérêt donc
pour moi de m'y arrêter.
Que retenir in fine de
ce débat ?
Et bien pour moi pas grand-chose
de neuf tant celui-ci n'a fait que confirmer mon opinion première à savoir que
cette primaire ne vise pas à trancher sur le fond entre différentes lignes politiques mais au contraire à choisir
une personnalité. Voire la personnalité de celui qui sera probablement le
prochain président de la République.
A ce sujet d'ailleurs,
et contrairement à ce que certains pensent, il n'est pas illogique, vu les
circonstances, que des électeurs de gauche ou en tout cas qui ne se disent pas
de droite prennent part à cette primaire. Primaire qui se veut d'ailleurs
ouverte.
Pour en revenir aux
candidats en lice, je dois avouer avoir été agréablement surpris par Jean-Frédéric
Poisson. "Cornérisé" du fait de son statut d'outsider et caricaturé
en affreux réac, le président du PCD (Parti Chrétien-Démocrate) s'est révélé
plutôt à l'aise dans cet exercice et a réussi, je trouve, à se démarquer de ses
concurrents par ses positions plus modérées en matière économique et l'expression
d'une sensibilité sociale généralement absente chez les autres participants.
Même bonne impression
de la part de François Fillon qui m'est apparu moins austère et moins
introverti que l'image que j'en avais. En revanche, j'ai trouvé que Nicolas Sarkozy
était quelque peu tendu et manquait de sérénité, ses tics physiques étant nettement
visibles par moment.
Quelques mots enfin sur
Nathalie Kosciusko-Morizet et Bruno Le Maire. L'un comme l'autre, à leur
manière, veulent incarner le changement et le renouveau et n'hésitent pas à renvoyer
dos à dos leurs adversaires. Si la stratégie n'est pas insensée, elle résiste
toutefois difficilement à l'épreuve des faits. En effet, l'un comme l'autre ont
été ministres du gouvernement Fillon sous le quinquennat Sarkozy et sont donc
comptables du passé. Par ailleurs, cette stratégie se résume pour grande partie
à des considérations de communication et d'image puisque leurs propositions ne
sont que peu novatrices.
Mention spéciale pour
finir aux journalistes qui ont mené les débats. Contrairement à ce que l'on
aurait pu penser, les trois interviewers (Gilles Bouleau pour TF1, Élizabeth
Martichoux pour RTL et Alexis Brézet pour le Figaro) n'ont pas hésité à poser
les questions qui fâchent et à évoquer les affaires judiciaires des différents
candidats (emplois fictifs du RPR, Bygmalion, affaire Jouyet). Assez rare en
ces périodes de collusion entre médias et politiques pour être souligné.
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