vendredi 14 octobre 2016

Retour sur #PrimaireLeDébat

C'est donc hier que TF1 diffusait le premier des trois débats de la primaire de la droite et du centre. Face à trois journalistes, les sept candidats (Jean-François Copé, François Fillon, Alain Juppé, Nathalie Kosciusko-Morizet, Bruno Le Maire, Jean-Frédéric Poisson et Nicolas Sarkozy) ont échangé et débattu pendant plus de deux heures.

Avant de se pencher sur les éléments de fond, quelques remarques sur la forme en préambule.
Le format choisi pour ce débat a, je crois, été paradoxalement la force et la faiblesse de l'émission. En effet, les temps de réponse courts impartis ont permis une circulation dynamique de la parole évitant ainsi des monologues interminables. A l'inverse la minute accordée était parfois (souvent) trop courte pour apporter une réponse construite et argumentée.
Évidemment ces contraintes de temps étaient directement liées au nombre de participants mais cela était également conditionnée par la volonté des organisateurs d'aborder un nombre important de sujets différents. Dans la mesure où trois débats seront organisés, je pense qu'il aurait été préférable d'associer une ou deux grandes thématiques à chaque confrontation afin d'aller davantage au fond des choses. En l'occurrence, consacrer ce premier temps d'échange exclusivement aux questions d'économie m'aurait semblé préférable.

Si l'économie n'a pas été l'unique thème du débat, il n'en reste pas moins que cette thématique a évidemment été abordée.  Chaque candidat a ainsi pu mettre (brièvement) en avant ses propositions qui sont finalement sensiblement les mêmes. Plus que des différences réelles de solutions, il s'agit davantage de nuances ou de degré d'appréciation. Sortie des 35h, réduction drastique de la dépense publique (entre 50 et 100 milliards d'euros par an) et du nombre de fonctionnaires (de 300 000 pour Sarkozy et Juppé à 600 000 pour Fillon), recul de l'âge légal de départ à la retraite ou encore baisse des charges pour les entreprises.

Vieilles recettes pour les uns, véritable surenchère pour les autres, il est clair que ces propositions s'inscrivent dans la continuité des politiques menées ces dernières décennies avec toutefois, reconnaissons-le, des niveaux jamais atteints. Pour autant, comment croire que ces solutions seront efficaces cette fois-ci alors qu'elles ont toujours échoué par le passé ? Pour la plupart, ces préceptes ne sont que des marqueurs, des positions face à de prétendus totems. Les 35 heures en sont l'exemple parfait. De fait, dans le privé, le temps de travail est déjà négocié au niveau des branches ou des entreprises. A l'inverse, dans le public, ces mêmes 35h ne sont pas toujours respectées. N'oublions pas non plus que ces 35h ne sont ni plus ni moins "que" la durée légale du travail permettant de déclencher les heures supplémentaires et qu'il est donc possible d'y déroger. Les raisons de la lutte contre les 35h ne sont alors pas forcément à chercher sur le terrain de l'économie. Au contraire, cela constitue un marqueur identitaire pour cette droite qui cherche à abattre ce "symbole de la gauche".

Pour en terminer sur le chapitre économie, je souhaitais souligner deux propositions à mon sens trop rapidement évacuées mais qui mériteraient un débat plus large. D'une part, la mise en place d'une "vraie TVA sociale" évoquée par Jean-François Copé, c'est-à-dire l'augmentation de trois points de la TVA en contrepartie d'une baisse des cotisations patronale et salariales. Objectif : gain de compétitivité pour les entreprises, hausse du salaire net et élargissement du financement de notre protection sociale. Ayant déjà abordé le sujet par le passé, je ne m'y attarderai pas davantage.
D'autre part, la question du statut des fonctionnaires a été posée notamment par Nathalie Kosciusko-Morizet. Je n'ai pas d'avis tranché sur le sujet mais je pense que cette question ne doit pas être condamnée par principe. Je crois au contraire qu'une réflexion doit être menée sur deux aspects : l'emploi à vie dans la fonction publique et la pertinence du statut de fonctionnaire dans les collectivités territoriales. Nous aurons l'occasion d'y revenir dans le futur.

La deuxième partie du débat était consacrée aux aspects régaliens (sécurité, immigration, laïcité …). Là encore beaucoup de sujets balayés en peu de temps. Et là aussi rien de nouveau sous le soleil tant les différentes propositions des candidats ont été largement évoquées dans les médias ces dernières semaines. Aucun intérêt donc pour moi de m'y arrêter.

Que retenir in fine de ce débat ?
Et bien pour moi pas grand-chose de neuf tant celui-ci n'a fait que confirmer mon opinion première à savoir que cette primaire ne vise pas à trancher sur le fond entre différentes lignes politiques mais au contraire à choisir une personnalité. Voire la personnalité de celui qui sera probablement le prochain président de la République.
A ce sujet d'ailleurs, et contrairement à ce que certains pensent, il n'est pas illogique, vu les circonstances, que des électeurs de gauche ou en tout cas qui ne se disent pas de droite prennent part à cette primaire. Primaire qui se veut d'ailleurs ouverte.

Pour en revenir aux candidats en lice, je dois avouer avoir été agréablement surpris par Jean-Frédéric Poisson. "Cornérisé" du fait de son statut d'outsider et caricaturé en affreux réac, le président du PCD (Parti Chrétien-Démocrate) s'est révélé plutôt à l'aise dans cet exercice et a réussi, je trouve, à se démarquer de ses concurrents par ses positions plus modérées en matière économique et l'expression d'une sensibilité sociale généralement absente chez les autres participants.
Même bonne impression de la part de François Fillon qui m'est apparu moins austère et moins introverti que l'image que j'en avais. En revanche, j'ai trouvé que Nicolas Sarkozy était quelque peu tendu et manquait de sérénité, ses tics physiques étant nettement visibles par moment.
Quelques mots enfin sur Nathalie Kosciusko-Morizet et Bruno Le Maire. L'un comme l'autre, à leur manière, veulent incarner le changement et le renouveau et n'hésitent pas à renvoyer dos à dos leurs adversaires. Si la stratégie n'est pas insensée, elle résiste toutefois difficilement à l'épreuve des faits. En effet, l'un comme l'autre ont été ministres du gouvernement Fillon sous le quinquennat Sarkozy et sont donc comptables du passé. Par ailleurs, cette stratégie se résume pour grande partie à des considérations de communication et d'image puisque leurs propositions ne sont que peu novatrices.

Mention spéciale pour finir aux journalistes qui ont mené les débats. Contrairement à ce que l'on aurait pu penser, les trois interviewers (Gilles Bouleau pour TF1, Élizabeth Martichoux pour RTL et Alexis Brézet pour le Figaro) n'ont pas hésité à poser les questions qui fâchent et à évoquer les affaires judiciaires des différents candidats (emplois fictifs du RPR, Bygmalion, affaire Jouyet). Assez rare en ces périodes de collusion entre médias et politiques pour être souligné.

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